Choisir son contrat de mariage
Le mariage n'est pas seulement une histoire de sentiments. Au fil des jours, les époux vont vite se rendre compte qu'il faut meubler et équiper leur logement, faire face aux dépenses du ménage, alimenter et gérer le compte en banque… Un contrat de mariage bien choisi permet d'organiser et de gérer au mieux les intérêts du couple.
Le choix d'un contrat de mariage est important car il détermine le régime matrimonial et, donc, les rapports financiers que les époux auront entre eux mais aussi envers leurs tiers. Le contrat de mariage permet à la fois :
- De "fixer" la composition du patrimoine de chaque époux en distinguant, à partir de leur origine, les "biens communs" des "biens propres" ;
- De préciser comment et par qui ces biens sont gérés, qui est tenu de payer les dettes, etc. ;
- D’indiquer les modalités d’établissement des comptes et du partage entre les époux en cas de divorce.
Important
Consultez votre notaire avant d’opter pour un régime matrimonial. Il vous aidera à choisir celui qui est le mieux adapté à votre couple et à vos projets, en tenant compte notamment de l’état de votre patrimoine avant le mariage et de votre activité professionnelle (activité salariale, commerciale, libérale…).
Avec ou sans contrat ?
Il n’est pas nécessaire d’établir un contrat de mariage pour se marier. Ce n'est pas une formalité obligatoire. Les époux qui se marient sans choisir un régime particulier ne sont cependant pas totalement "démunis". Ils adoptent, par défaut, et parfois sans le savoir, le régime légal de la "communauté aux acquêts".
Le régime légal
Le régime de la communauté aux acquêts se caractérise par la mise en commun des biens acquis à compter de la date du mariage ("les acquêts").
Les acquêts comprennent les biens achetés pendant le mariage grâce aux divers revenus du couple (maison, meubles …), ceux créés pendant le mariage (par exemple un commerce), les revenus professionnels perçus pendant le mariage dès lors qu'ils sont épargnés ou investis dans un bien durable et, enfin, les revenus provenant d’un bien propre. Chaque époux peut accomplir, seul, les actes de gestion "courante". En revanche, en cas d’emprunt ou d’hypothèque, l’accord des deux conjoints est nécessaire.
À cette masse commune que sont les acquêts, il faut opposer les biens propres, c’est-à-dire les biens acquis par chacun avant le mariage (maison, titres, …), ceux reçus par succession, donation ou testament, ainsi que ceux acquis grâce à l’argent provenant de la vente d'un bien propre (avec déclaration de remploi).
Chacun des époux administre à sa guise ses biens propres et peut en disposer librement (les vendre, les donner,…). À une exception : le logement familial qui nécessite le consentement des deux conjoints, même si le bien appartient personnellement à l’un d’eux.
À savoir
Certains biens, même s'ils sont acquis pendant le mariage, n'entrent jamais dans la catégorie des biens communs. Il s'agit des "biens propres par nature" (instruments de travail nécessaires à l'exercice de la profession d'un des époux, indemnité reçue en réparation d'un préjudice corporel ou moral…).
Régime à la carte
Il n’existe pas de bon ou de mauvais régime matrimonial. Chacun a ses particularités, ses avantages… et ses points faibles.
La séparation de biens
Le patrimoine de Monsieur et celui de Madame sont bien différenciés. Chacun reste propriétaire de ses biens et revenus, les gère et en dispose à sa guise. Chaque époux assume également seul les dettes qu’il contracte. Ce régime se caractérise par l’indépendance matérielle vis-à-vis du conjoint. Souvent recommandé aux professions dites "à risques" (commerçants, artisans, professions libérales…), il permet de mettre son conjoint à l’abri en cas de mauvaises affaires. Ce régime peut toutefois poser des difficultés si l’un des époux a des revenus plus faibles ou ne travaille pas ; il risque de le désavantager. La solution pour rétablir l’équilibre consiste alors à faire une donation en sa faveur.
Les limites de l'indépendance
Dans le régime de la séparation de biens, chacun des conjoints doit contribuer financièrement aux charges du mariage et à l'éducation des enfants. Mari et femme sont également solidaires du paiement des dettes dites "d'entretien du ménage", de l'impôt sur le revenu et de la taxe d'habitation. Enfin, même si le logement familial appartient personnellement à l'un des époux, ce dernier ne peut pas le vendre sans le consentement de l'autre.
Régime à la carte (suite)
La communauté universelle
Les époux n’ont qu’un seul et même patrimoine composé de tout ce qu’ils ont acquis durant leur mariage, de ce qu’ils possédaient "en propre" lors de l’adoption de ce régime, ainsi que des biens qu’ils recevront à la suite d’une donation ou d’une succession. Ce régime est souvent associé à une clause dite "d’attribution intégrale de communauté", prévoyant qu’au décès du premier des époux, la totalité des biens reviendra à son conjoint. Mais l’avantage essentiel de cette clause est fiscal : la transmission échappe aux droits de succession. En revanche, ce régime désavantage les enfants qui devront attendre le décès du second parent pour hériter et, surtout, ne pourront bénéficier que d’un seul abattement. D’où une fiscalité plus lourde. Pour ces raisons, ce régime est surtout conseillé à des personnes sans enfant.
La participation aux acquêts
Très prisée de nos voisins allemands ou suisses qui en ont fait leur régime légal, la participation aux acquêts est peu répandue en France. Dans ce régime hybride, durant le mariage, les époux sont totalement indépendants, comme s’ils étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. Si une acquisition commune est réalisée, le bien concerné sera soumis au régime de l'indivision. En revanche, lors de la dissolution du mariage (divorce ou décès), chacun des époux a droit à la moitié des enrichissements (acquêts) réalisés par l’autre. Pour déterminer cet enrichissement, il faut procéder à un calcul assez complexe qui consiste à comparer le patrimoine de chacun au jour du mariage à celui existant au jour de la dissolution du mariage après soustraction des dettes. Pour être parfaitement efficace, cette opération suppose donc un inventaire précis et chiffré de ce que chacun avait à l’origine et de ce qu’il a acquis par la suite.
Changer un peu… ou beaucoup !
Choisir un régime matrimonial n'est pas un engagement définitif. Il est possible d’aménager son régime matrimonial, voire d’en changer complètement. Explications…
Les aménagements possibles
Il est possible d’aménager les règles du régime légal de la communauté aux acquêts et d’adopter des clauses plus "personnelles" concernant la composition du patrimoine, sa gestion ou le partage.
Parmi les plus fréquentes, on retrouve :
- La "clause d'ameublissement" qui permet aux époux de faire entrer dans la communauté un ou plusieurs biens propres ;
- La clause d'administration conjointe, par laquelle les époux conviennent d'administrer conjointement la communauté. Les actes d'administration et de disposition concernant les biens communs nécessitent les deux signatures ;
- La clause de "préciput" permettant au conjoint survivant de prélever sur la communauté, avant tout partage, soit une certaine somme, soit certains biens ;
- Les clauses de partage inégal écartant le partage de la communauté par moitié et permettant aux époux de prévoir que la communauté se partagera suivant d'autres proportions.
- Le régime de la communauté de meubles et acquêts (le régime légal jusqu'en 1965) qui comporte, en plus des meubles acquis par les époux pendant le mariage, les meubles dont les époux étaient propriétaires au jour du mariage et ceux qu'ils reçoivent par donation ou succession pendant le mariage (sauf clause contraire).
Changer de régime
On peut modifier son régime matrimonial (ou en changer) à tout moment, à condition que deux ans se soient écoulés depuis le mariage (ou le précédent changement). Le changement doit être motivé par l'intérêt de la famille et ne doit pas constituer une fraude aux droits des tiers (essentiellement les créanciers). Enfin, les époux doivent être d’accord sur le principe du changement.
L'acte constatant le changement de régime matrimonial est officialisé par un acte notarié puis soumis à l'homologation du tribunal de grande instance du domicile des époux. Suivent différentes mesures de publicité destinées à informer les tiers de cette modification (annonce légale, inscription en marge des différents actes d'état civil, etc.).
À savoir
Selon les chiffres communiqués par le ministère de la Justice, les changements de régime matrimonial ont diminué de près de 20 % en 10 ans. Les changements se feraient dans 84 % des cas en faveur de la communauté universelle et émaneraient de personnes de plus de 60 ans. Les changements en faveur d’un régime séparatiste représenteraient 10 % des homologations et seraient demandés à plus de 85 % par des couples actifs ayant moins de 65 ans.
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